La petite voix.


A l’école, la première fois qu’on t’a demandé ce que tu voulais être quand tu seras grand, ta petite voix aurait bien répondu "heureux" mais t’avais peur de décevoir. Alors tu as réfléchi encore un peu. A 5 ans, le doudou à la main, tu veux devenir dresseur de dauphins. C’est décidé. A 10 ans, les pieds sur terre, tu veux devenir écrivain. C’est certain. A 20 ans, la tête dans les étoiles, tu veux juste fumer des clopes en découvrant le monde qui se joue autour de toi. C’est déjà mieux que rien.

En un pas de géant, tu te retrouves maintenant. T’es tombé dans le monde des grands. En un claquement de doigts, tu te retournes. Il te reste plus qu'à observer le chemin parcouru. La réussite en ligne de mire, t'as foncé tête baissée avec pour seules armes ta conviction et ton obstination. De la cour de récréé au lycée, du CDI au CIO, des pré-rentrées aux réunions d’orientation, t’as décroché le graal. La vie professionnelle a alors suivi sa route. Ton ambition personnelle, elle, a fait banqueroute. 

A l’aube des 30 ans, c'est l'heure de faire un premier bilan. Tu t'es doucement éloigné de tes rêves d’enfant en claquant la lourde porte toute rouillée du lycée. En tirant un trait sur le passé. Les yeux bandés et les mains collées sur les oreilles, tu as sauté à pieds joints dans la réalité. Sans regarder derrière toi. Sans écouter ce que te chantonnait tout doucement cette petite voix d’enfant. Les années ont coulé. Tes rêves de gosse ont filé. Comme évaporés. Ta petite voix s’est terrée au fond de toi. Comme étouffée. Tu as fini par la prendre de haut. Tu as fini par te prendre au sérieux. Et pourtant, cette voix d'enfant qui voulait s’exprimer sur les bancs d’école ne s’était pas trompée. Ta petite voix chantait déjà juste. Elle avait accordé ta partition à la perfection. La mélodie de ton bonheur était écrite. 

Finalement, il n'y a pas d'âge pour lui donner raison. Alors maintenant tu vas l’écouter. C'est décidé. Tu vas suivre son instinct. C’est certain. Et tu vas tout faire pour que ses rêves de gosse puissent exister. Et c’est déjà mieux que rien.




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