Le placebo des héros.

A chaque fois, tu as l'impression que tu t'apprêtes à faire le casse du siècle. Que si la maîtresse te choppe, tu vas prendre bonbon. Mais justement, c'est pour ça que c'est si bon. Le goût de l'interdit n'a jamais autant eu un air de paradis. Tu sais d’avance comment ça va se finir. A peine tu y as pensé, tu ne peux déjà plus y résister. Pas la peine de te faire un dessin, tu connais déjà la fin. Mi enfant de deux ans et mi ours mal léché, ce n'est plus le moment de te culpabiliser. En un coup de bluff, tu n'es plus le même : tu vendrais père et mère s’il le fallait. C'est un peu comme la dernière cigarette ou le verre de trop. Tu sais que tu es en train de faire une bêtise, tu sais que c’est pas raisonnable, que ça ne vaut pas le coup….mais quoiqu’on t’en dise à ce moment là, ta tête n’est plus et ta main plonge. Dès le bout de la cuillère, tu sens l'effet en toi. Dans le poignet directement. Ça descend, tu le sens. Ça frôle ce qui aurait pu s’appeler des abdominaux. Et paf, dans les cuisses. En un tour de pot, le mal est fait. En un tout petit tour de pot de rien du tout. Le mal est fait certes, mais avant d'arriver aux cuisses, le mal est venu te tartiner le cœur à grand coup de réconfort. A grand coup de cuillère. Comme une pommade apaisante. Comme un baume bienfaisant qui vient se tapir illico sur tes petits bobos. A grand coup de spatule. Sur les parois de ta gorge comme pour faire passer le tracas, le coup de blues, ou l'ennui qui te taraude. Encore une fois, tu as succombé.
Volonté 0, Réconfort 1.
Encore une fois, tu n’as pas résisté. Après le dernier coup de cuillère fatal, que tu sois seul ou pas, à midi ou à minuit, c'est à chaque fois la même rengaine. Le même rituel, la même ritournelle : tu le vis comme un drame national. Fallait s’y attendre. Le mal est fait, la dose a fait son effet. A chaque fois, tu te demande ce qu'ils peuvent bien mettre là dedans pour te faire fondre à tous les coups. A chaque fois, tu te promets qu'on ne t'y reprendra plus. Jamais plus. Mais encore une fois, la cuillère du réconfort a eu raison de toi. Tant pis pour cette fois. Tu comprends mieux pourquoi certains réclament qu'elle soit prise en charge par la sécu et remboursée comme un médicament. Pâte à tartiner de malheur certes mais pâte à étaler sur tous les petits maux, pâte à maroufler le coeur, pâte à tapisser délicieusement le fond de la gorge pour y faire glisser la petite boule d'anxiété et laisser place au bonheur.
Pâte à tartiner des coeurs blessés, le placebo des héros.
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