Excusez-moi de vous déranger.


Excusez-moi de vous déranger. Tu te revois prendre cet air tiré à quatre épingles, sortir ce sourire pincé et cette voix distinguée tout ça pour utiliser des mots bien réfléchis joliment enrobés dans une phase bien polie, toute lisse. Que ce soit pour demander une augmentation ou l’addition, tu avais tendance à sortir ton costume du dimanche pour affronter chaque situation et pour engager chaque conversation. 

Comme si tu avais peur de déranger. Tu prenais souvent ton air des plus gênés comme si tu t’excusais d’avance d’être née. Chaque discussion avec une âme inconnue non répertoriée dans tes amis ou ta famille t’apparaissait comme un nouveau défi. Tu te retrouvais voix chevrotante et mains tremblantes dans tes petits souliers. De peur de déranger, un peu. De peur d’être juger, beaucoup. Parler avec n'importe qui était trop rare. Pour discuter de n’importe quoi, de tout et surtout de rien, encore moins. On ne se connaît pas, on ne se parle pas. T’as rien à foutre dans mon monde, arrache-toi de là, t’es pas d’ma bande.

Et puis soudain une rencontre change la face du monde. L'arrivée d'une petite âme te fait changer ta façon de voir la vie et tout bascule dans ton univers. Bizarrement, c'est comme si ton centre de gravité s'était déplacé, comme si la vie était devenue tellement précieuse que tu n'avais plus besoin de prendre des gants, comme si tu n’avais plus de temps à perdre, comme si tu étais devenue toute légère, comme si tu avais des tas de choses à raconter, comme si tu n’avais plus besoin de te justifier. Que tu avais fait tombé le masque, que tu n’avais plus peur de déranger, d’être juger, d'être embarrasser. Soudain, tu as l’impression de ne plus avoir besoin de te cacher et enfin, tu as l'impression d'exister pleinement, spontanément et tout naturellement. Avec tes mots, tes défauts, tes aspérités mais en toute vérité. Plus besoin de faux semblants, plus besoin de montrer les dents. Les mots sortent tous seuls, les phrases sont moins réfléchies mais qu'importe, tu as ôté tes gants, quitté tes  manières, abandonné tes pincettes et décidé de laisser faire. Et depuis tu te sens tout légère là où tu es. Et depuis, tu fais des tas de belles rencontres au coin de la rue.

Moins réfléchie mais tout aussi spontanée. Une seule petite personne a suffit à te botter le cul, à te faire prendre conscience que la vie est toute aussi belle au naturel. Que les bons moments et les belles rencontres ne sont pas forcements prémédités et que rien ne vaut la spontanéité.

D’avance, excusez-moi pour le dérangement.

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