Hommage.
Et
dire qu’il avait répandu de l’amour autour de lui. Qu’il avait semé de la
tendresse un peu de partout sur son passage. Aux petits, il donnait toujours de
délicates attentions. Il se forçait à supporter leurs cris et leurs gestes
parfois désobligeants. Aux plus grands, il avait tenu compagnie les soirs de
grande solitude. Les voyant si esseulés, il était venu plus d’une fois leur
tenir chaud en se lovant prés d’eux sur le divan. Il avait même trainé ses
sales pattes de partout dans la maison d’à côté. De la cave au grenier, il
avait tout visité. Il était connu dans le quartier. Beaucoup le craignait. De
par sa carrure, il en avait fait fuir plus d’un. Et pourtant, il avait le don de rendre les gens heureux. Est-ce
que quelqu’un le cherchait au moins ? Peut être que non, même pas. Peut
être que tout le monde s’en moque. Tous penseront qu’il est encore parti prendre
l’air pour quelques jours. Qu’il s’est fait hébergé pour quelques nuits. Qu’il
a encore trouvé un bon gîte et une bonne table pour quelques temps. Chacun
vaque à ses activités comme il n’allait pas tarder. Ou comme il n’avait jamais
existé. Comme si de rien n’était. La vie continue ici et là tout autour de lui.
Lui qui est maintenant couché de tout son long dans le caniveau.
Mener
une vie de chat pour mourir comme un chien. L’injustice est trop grande. Alors
rendons hommage à ce pauvre matou mort comme un ignorant au bord de la route. Il
a le droit aujourd’hui de mourir dignement. Il a le droit de porter un prénom
en bon défunt qu’il devient.
Il
s’appellera Jean René.
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